[Mission 7] Guérison en territoire elfique

Reyna avait mal. Très mal. Bon, elle n'allait pas souffrir pendant des lustres mais cette fichue nature épineuses lui en avait fait voir des vertes et des pas mûres ! Surtout le moment ou un satané buisson de ronce semblait s'être pris d'affection pour la jeune fille.
Malgré son épée pendante qui se trouvait attachée sur sa taille, il avait fallu demander de l'aide a un soldat, qui, visiblement, n'était pas très fûter. Le buisson en question avait fini par la relâcher et s'ensuivit alors une paranoïa jamais atteinte.

Les épines s'étaient profondément enfoncées dans ses cheville nues et du sang - pas trop tout de même - s'écoulait des petites plaies. On l'avait transférée a l'infirmerie, lui disant que les guérisseurs seraient bientôt là. Qu'il se dépêche nom de Dieu !
Entre temps, Reyna avait eu le temps de rassembler dans sa mémoire la "discussion" entre elle et son maître, Khanrell, quand elle l'avait envoyé en territoire Diamantois.

Elles sortaient d'une intense et longue séance d'entraînement quand on avait signalé a l'Ordre qu'un groupe de soldats allaient tenter de donpter cet nature indomptable. On avait proposé un poste a Khanrell qui l'avait refusé puis, elle avait osé proposer Reyna pour la remplcer. Quel culot ! Même si elle lui devait le respect et l'obéissance, même si c'était la chef des Seccyeths, cela ne se faisait p)tout simplement pas !

Fidèle a son caractère, l'adolescente avait expliqué a Khanrell qu'elle ne voulait pas y aller. Celle-ci lui avait répondu que c'était son devoir d'aider les autres et que ce serait un excellent entraînement. La jeune fille eut beau lui lancer toutes les vacheries qu'elle connaissait, rien n'avait fait changer d'avis la jeune femme. Ce qui l'avait amené a penser que Khanrell n'aimait pas les autres et ne faisait aucun effort pour être sociable avec qui que ce soit !

Elle soupira et bougea les jambes avant que la douleur ne puissent lui rappeler son état. Les soi-disants infirmier lui avait posé une sorte de plâtre bien que la cheville n'aie que des égratinures. Un cri la fit sursauter et elle tourna la tête vers son voisin de gauche. Reyna se retint de vomir : son épaule était déboîtée et ses genoux formaient des angles plutôt inhabituel... Elle détourna les yeux avant de dégobiller pour de bon.

Elle fixa le bout de son lit et découvrit l'un des soldats qui la contenplait bizarrement. Cela la mettait mal a l'aise et du coup, elle s'énerva.

- Qu'est-ce que tu as a me regarder comme ça ?! Va donc t'occuper ailleurs nom de Dieu !!


On peut facilement identifier trois choses flagrantes chez Reyna.
- Elle n'est jamais très aimable.
- Elle adore jurer.
- Elle n'a aucune patience.
Pas besoin de chercher bien loin l'origine de son caractère dur et quelque peu désobéissant : son maître s'était suicidé et Khanrell était aussi froide qu'un bloc de glace. L'effet de ce brusque changement inatendu faisait d'elle quelqu'un de peu sociable mais elle ne s'en rendait nullement compte.

L'homme la regarda ume dernière fois, l'air triste... Reyna soupira de soulagement. Elle avait déjà entendu des choses pas très nettes voir plus que douteuses se produire avec des jeune filles de son âge. Elle ne tenait pas a savoir le pourquoi du comment et préférait rester dans cette ignorance. Cela pouvait la mettre en danger mais aussi en sécurité.

Reyna se mit a observer l'entrée et y vit un jeune garçon qui devait avoir son âge. Un soldat s'approcha de lui, tirant une esclave par le bras. Celle-ci devait être plus âgée qu'elle sans doute. Elle ne ressemblait pas aux Empiriens. Si elle était réellement esclave, elle était peut-être une Enkiev originaire de cette contrée Diamantoise.

Les deux adolescents observèrent la marée de visage qui les scrutaient dans l'attente d'un soin. Seule Reyna ne les regardait pas. Elle n'en avait rien a faire. Tout ce qu'elle voulait c'était rentrer dans son foyer a Argent.
Une voix mal assurée retentit près d'elle ce qui la fit sursauter une fois de plus. C'était le garçon de l'entrée avec l'esclave. Il lui dit qu'il s'appelait Mykhael et était un apprenti sorcier. Il voulait qu'elle se présente et lui décrive son état. La jeune fille se retint de rire. Il... bégayait ! Comme s'il était gêné ou avait peur d'elle !

- Je m'appelle Reyna et je suis une apprentie Seccyeth. Mon état ? Un buisson de ronce a pris ma cheville en affection et la cicatrisation fait que deux trois épines restent plantés dedans. Je supporte mais ça fait pas du bien non plus.

Voilà. Elle aurait voulu lui dire d'aller s'occuper d'autres personnes mais il semblait décider a rester ici.
En elle-même, Reyna maudit son Khanrell de l'avoir envoyée dans un pétrin pareil.

[Défi ! Allez, amusez-vous à le trouver^^]

_ Diiiis Dada, tu me racontes une histoire ?

La jeune fille regarda la potiche qui lui faisait office de maîtresse. Datura devait bien avoir son âge, peut être un peu moins, mais dans sa tête, elle était encore une gamine. Chaque soir depuis trois ans, c'était le même rituel : grimée et costumée, Damrisha racontait une histoire parmi celles que le gouverneur lui avait apprises. Bien sûr, il était hors de question que la petite chérie écoute des histoires indécentes, alors tout ce qu'elle pouvait voir ou entendre était attentivement surveillé. Dans un coin de la pièce, un garde observait Damrisha pendant qu'elle répétait son "cirque" comme elle l'appelait intérieurement. Le dire tout haut lui vaudrait quelques coups de fouets bien sentis. Quand la jeune fille arriva au milieu de son récit, Datura dormait déjà à poings fermés. Le garde se leva et s'approcha de Damrisha pour l'accompagner dans sa propre chambre. Cet imbécile avait déjà plus d'une fois réveillé Datura en voulant faire sortir Damrisha trop tôt et elle avait du recommencer une autre histoire. Heureusement, ce soir-là l'Affreuse dormait profondément.

Le garde suivit Damrisha jusqu'à sa chambre, où tout du moins ce qui y ressemblait. La jeune fille dormait dans ce qui était anciennement une chambre de bonne communiquant avec celle de Datura. Pour la sécurité de la petite, la porte reliant les deux chambres était condamnée. Damrisha ne put s’empêcher de pousser un énième soupir en rentrant dans sa chambre. Il faut dire que c'était Datura qui en avait fait la décoration. La pièce était donc surchargée de rubans et de froufrous rose et blanc avec d'horribles fourrures noires. Tout était d'une qualité surprenante pour une chambre d'esclave, mais Damrisha aurait préféré une bonne vieille laine de mouton. Elle s'endormit assez rapidement, puis fut réveillée au petit matin par le soleil filtrant à travers ses rideaux. Les rideaux étant d'un rose fuchsia presque rouge, la chambre baignait dans une ambiance... sanguine. Curieusement, Datura ne l'avait pas réveillée par ses petits piaillements de fouine qu'elle poussait de son lit ou à travers la porte quand elle était vraiment impatiente.

Damrisha profita de ce moment de répit pour se lever sans se presser. Elle rangea son costume de la veille qu'elle avait laissé au pied de son lit - qui ressemblait plus à un panier à chat avec sa superposition de couvertures et couettes allant du blanc éclatant au rose rouge en passant par le rose dragée. N'ayant pas reçu de consigne, la jeune fille s'habilla simplement pour une fois : une tunique légèrement bouffante tenue par une ceinture de cordes tressées, un pantalon amples et une paire de bottes. Si la "princesse" avait d'autres exigences par la suite, elle ne passerait pas trois heures pour se changer de nouveau. Une fois prête, Damrisha se rendit dans la chambre de sa maîtresse. Le garde en faction devant sa porte entra en même temps que la jeune fille. Damrisha s'approcha de l'immense lit à baldaquins en tulle blanc et rose bonbon - oui, oui, les même couleurs que pour un baptême - et tira sur l'un des rideaux. Si Datura ne s'était pas levée ce matin, c'était parce qu'une vilaine fièvre la clouait au lit.

Immédiatement, ce fut le branle-bas de combat. Damrisha était toujours impressionnée par toute l'énergie dépenser pour la sécurité et le bien être de cette foutue gamine. A peine le temps dire "vive la ribaude !" qu'un mini régiment campait devant la porte et que le gouverneur accompagné de son médecin en chef était au chevet de Datura comme un adorateur agenouillé devant son dieu... Il était clair que la petite peste passerai le reste de la journée au lit, alors Damrisha préféra quitter la chambre pour aller prendre son petit déjeuner dans la cuisine. En temps normal elle mangeait avec Datura, mais là, hors de question d'avaler -ou d'essayer d'avaler - quoique ce soit entre un nid à MNIPHC (Maladie Non Identifiée et Potentiellement Hyper Contagieuse) et un pseudo médico-magico-guérisseur qui passait son temps à parler de fièvre typhoide, de congestion nasale, et de syndrome post traumatique conséquent à l'ingestion d'un... truc. Ou comment avoir l'air savant alors qu'on ne sait rien du tout et qu'avouer un tel crime est passable, au mieux, d'un séjour dans un cachot peuplé de rats. Bref. Damrisha eu le temps de prendre un solide petit déjeuner avant qu'un garde n'arrive pour la trainer à l'extérieur de la résidence gouvernementale... gouvernale... gouvrale ?... bref, du gouverneur.

La grosse brute l'entraina vers une charrette dans laquelle attendait un autre garde visiblement pas très ravie de jouer les gardes-chiourmes. Le véhicule s'élança à peine sa passagère embarquée. Damrisha ne savait pas où on l'emmenait, mais ce n'était pas une première. Ca ne la dispensait pas de se demander si son exécution était oui ou non à l'ordre du jour. Après tout, ce paranoïaque de gouverneur pouvait très bien s'imaginer qu'elle ai pu empoisonner la gamine. Comme si elle pouvait approcher de près ou de loin un poison pour ensuite le faire manger ou boire à Datura. Cette fille avait son propre goûteur ! Plongée dans ses pensées, Damrisha fut surprise par l'arrêt violent de la charrette et s'étala très gracieusement comme une crêpe. Tout en se moquant d'elle, le garde la fit descendre sans ménagement. La jeune fille regarda autour d'elle pour deviner quel sort l'attendait. Elle n'était encore jamais venu dans ce coin de la colonie. Ce n'est qu'à l'intérieur du grand bâtiment dans lequel on l'emmena, qu'elle comprit ce qu'on attendait d'elle.

A peine entré, le garde la tira vers un garçon qui aurait pu être son petit frère - les plumes en moins. Il lui expliqua ce qu'on attendait de lui et insista bien sur le fait qu'elle était un objet - un outil à utiliser, une poupée à ne pas briser. Damrisha détestait quand les coloniaux la rabaissait à ce point : elle était un être humain, bordel ! Mais bon, l'Empire tue les humains et joue avec les poupées, alors être une poupée - qui respire de préférence. La jeune fille se contenta de fusiller - discrètement - du regard le garde qui s'éloignait avant de faire attention au gamin à plumes.

-Je suis Mykhael, apprenti-sorcier d’Émeraude. Écoute heum… si t’es sympa j’serai sympa, on va faire ce qu’ils attendent de nous bien sagement et il ne t’arrivera rien, je n’ai pas l’intention de me servir de mes pouvoirs contre toi si tu restes tranquille…

Damrisha cligna des yeux et fut tentée de se pincer pour être sûre d'avoir bien entendu. Ce mioche essayait de lui faire peur ? Avec sa tête d'oisillon tout juste sorti de l’œuf, il voulait lui faire croire qu'il pouvait lui faire... mal ? A son âge, Damrisha avait tué sa propre sœur. Ce gamin était tout juste bon a lui faire une pichenette. Quoique... il était "apprenti-sorcier", alors la pichenette pouvait être un peu plus méchante que prévu. Prudente, la jeune fille attendit que Mykhael lui fasse signe avant de le suivre. Il s'approcha du lit le plus proche sur lequel reposait une jeune fille qui voulait visiblement qu'on lui fiche la paix.

_ Bonjour Ma-mademoiselle, j-je suis Mykhael je suis l-là pour v-vous aid-der… Pouv-vez vous vous prés-s-sentez et m’inf-f-f-ormer sur vot-t-re état?

L'espace d'un instant, Damrisha crut que sa mâchoire allait se décrocher. Ce gosse était censée devenir un être maîtrisant d'inquiétant pouvoirs magiques, mais il était visiblement plus "apprenti" qui "sorcier. Quand il se tourna vers elle, elle se ressaisit un minimum. Elle n'avait pas pour habitudes de laisser paraitre ses sentiments.

_ Qu-qu-qu’elles sont tes com-com-compétences en gué-guérison? Qu’elle est t-t-ton nom au juste?

Non, décidément c'était trop. Éclater de rire dans ce genre de situation n'est pas des plus prudents ni diplomatiques, alors Damrisha cacha sa bref hilarité derrière une quinte de toux alors que la blessée répondait à la question du garçon.

_ Je m'appelle Reyna et je suis une apprentie Seccyeth. Mon état ? Un buisson de ronce a pris ma cheville en affection et la cicatrisation fait que deux trois épines restent plantés dedans. Je supporte mais ça fait pas du bien non plus.

*Mais dans quoi suis-je tombée ?*

Après l'apprenti bègue, elle avait droit à l'apprentie mère nature... Oh joie ! Enfin bon, c'était toujours mieux que de jouer à la poupée avec un chaton habillé comme une draguée.

_ Je m'appelle Damrisha. Je sais reconnaitre certaines des plantes et leurs applications. Ce ne sont que des connaissances théoriques, je n'ai jamais eut à les mettre en pratique.

...ou plutôt ce ne sont pas ces connaissances qu'elle a eut à mettre en pratique. Révéler à des inconnus que l'on connait la composition et les antidotes de nombreux poisons n'est pas très prudents, surtout quand chacun de ces inconnus est susceptible de vous donner un coup de poignard dans le dos - volontairement ou non.

Le garçon semblait de plus en plus gêné de se retrouver ici en présence de tous ces malades, ou plutôt, blessés. Mais il n'en fit rien. Puis, Reyna remarqua de petite feuilles vertes dans ses cheveux. Au début, elle crut qu'elle avait mal vu mais, en y regardant de plus près, elle se rendit compte qu'il y avait bien un végétal dans sa tignasse ébouriffé qui lui donnait encore plus l'air d'un gamin.

Mykhael souleva la couverture jusqu'à ce que les trois jeunes puissent voir le "bandage" qui recouvrait ses plaies à peine cicatrisées. Aucune odeur de pus ne parvenait à l'adolescente, ce qui était bon signe sans aucun doute.

Le jeune apprenti-sorcier fixa la blessure du regard et les feuilles de sa chevelure se mirent à pousser plus nombreuses et plus vite. Ensuite, elle vit les végétaux s'enrouler autour de sa cheville, prélever les ronces et les retirer sans lui faire le moindre mal. La jeune fille était ébahi. Elle avait déjà vu de la magie mais n'en avait presque pas pratiquer. Elle s'était toujours dit qu'elle préférerait mille fois mieux être à dos de dragon...

Reyna ne le remercia même pas. Elle avait trop de fierté pour ça. A part à son maître et à ceux qu'elle en jugeait digne, elle ne daignait presque jamais adresser la paroles aux personnes présentes dans son entourage même si elles osaient lui parler.
Un peu de sang s'écoulait maintenant de la plaie et elle entendit le garçon demander des pansements à Damrisha.
Ce nom était - du point de vue d'une fille de quatorze ans - tout a fait bizarre, démodé et peu attirant. Bien sûr, elle ne le dit pas à voix haute ! Elle se serait sans doute pris une bonne gifle bien méritée et ce n'est sûrement pas elle qui serait allée se plaindre de maltraitance.

Cependant, tandis que la jeune femme se relevait, les pansements en main, Reyna ne put s'empêcher de se demander une fois de plus si elle venait d'Irianeth ou d'Enkidiev.

Dis-moi, viens-tu d'Irianeth ? Tu m'as l'air bien étrange.

Elle ne savait même pas si l'esclave l'avait entendu. Peu importe. Elle ne cherchait qu'à satisfaire sa propre curiosité ce qui ne luit apporterait aucun bonus en apprentissage quelconque. Elle ne voyait que les côtés pratiques de chaque chose et cette question n'en avait aucune.

Puis, Mykhael parla de nouveau et elle se rendit compte qu'il ne bégayait plus. Il devait se croire fort d'avoir réussi son modeste sort en présence de femmes. Reyna devait peut-être avoir l'air féroce ou tout simplement très peu aimable, mais Damrisha, elle, avait l'air à l'affût, telle une tigresse traquée. Un air d'animal en cage, dévorant ses barreaux chaque jours...
Des comparaisons, Reyna en avait pleins.

Le sang se mettait à recouvrir entièrement la plaie et le liquide chaud et poisseux se rajoutait à l'inconfort qu'était ce semblant d'infirmerie. Pourtant, l'adolescente n'avait qu'une envie. Qu'ils partent tous deux vers d'autres patients. Depuis environ dix minutes elle avait fini de faire le plan de l'infirmerie et comptait se sauver dès que possible.

- Dites, vous ne voudriez pas allez vous occuper d'autres personnes ? pourquoi pas ?

La tigresse dû sous-entendre quelque chose car elle la regarda soupçonneusement et Reyna baissa les yeux. Elle se maudit de sa lâcheté. Les quelques soldats dispersés ça et là étaient sans doute inoffensifs mais ses deux interlocuteurs ne l'étaient sans doute pas.
Le gars qui se prenaient pour Robin des Bois.
La tigresse en cage prête à bondir.
L'adolescente blessée et toujours fière.
Les malades geignards les entourant innombrablement.
Les soldats qui tentaient de les calmer, impuissants.
Quel tableau ironique !

[Défi again !]

Damrisha ne fit aucune remarque sur le fait qu'elle serait utile "en fait". Le bègue semblait la prendre pour une esclave tout juste capable de dire "oui maître", "à vos ordres, maître"... C'était assez vexant, mais au moins il ne la soupçonnait pas de vouloir le tuer de mille-et-une façons. Même si elle s'imaginait ces milles-et-une façon, jamais elle ne passerait à l'action. Alors autant laisser filer. La jeune fille ne faisait pas particulièrement attention à ce qu'il disait à Reyna, aussi, elle fut particulièrement surprise quand elle vit des plantes pousser sur sa tête et attraper les épines blessant la pardusse.

*Qu'est-ce que c'est que... ça ?*

Damrisha n'avait pas souvent vu de magie à l’œuvre. En fait, elle n'avait vu que son frère. Erwyn adorait faire bouger des objets ou faire des dessins dans la terre - sans toucher la terre bien sûr. Mais cette magie "plantesque" - oui, je sais, ça n'existe pas comme mot mais je viens de l'inventer, na - était vraiment étonnante. Le gamin ressemblait maintenant à une plante à plumes qui aurait utilisée un pétard pour se coiffer... Plutôt exotique. Après ce petit numéro, le piaf bègue à la coiffure d'herbes folles sembla reprendre un peu d'assurance.

- Damrisha regarde dans le petit sac que le soldat m’a donné.

Docile, la jeune fille s'accroupit pour farfouiller dans le sac posé au pied du lit. Alors qu'elle faisait un rapide inventaire de leurs "outils", elle se désintéressa de Mykhael et Reyna. "Outils" était un bien grand mot pour parler de ce qu'ils avaient à leur disposition. Un lots d'aiguilles en os de différentes tailles - noircies par endroits, elles avaient tellement servies que certains "trucs" restaient incrustés, presque fossilisés. Un tas de tissus épais et visiblement absorbants - Damrisha soupçonnait qu'ils étaient utilisés par des femmes pendant leurs saignements mensuels. Une bobine de fils -probablement en crin de cheval, sans doute le plus épais et le plus désagréable pour recoudre une plaie. Un tas de bandes de tissus pour les bandages - tellement usés et rêches qu'ils provoquaient surement des démangeaisons digne d'une colonie de fourmis carnivores. Et pour finir, un pot en bois mal dégrossi qui renfermait un onguent - quand Damrisha l'ouvrit, elle sentit une horrible odeur de camembert aux œufs pourris. Le remède était pire que le mal. A défaut, la jeune fille prit quelques pansements avec quelques bandes - exit le baume du Grand Mort - et se releva.

- Dis-moi, viens-tu d'Irianeth ? Tu m'as l'air bien étrange.

Damrisha ne pu s'empêcher de lever un sourcil. Avait-elle l'air d'avoir des plumes, des poils, ou des écailles ? Cette fille chat n'avait pourtant pas l'air idiote. Mais bon, le gamin piaf était un magicien. L'habit ne fait pas le moine comme on dit. Damrisha en avait la preuve flagrante. Néanmoins, elle allait répondre de façon très diplomatique quand Mykhael lui coupa la parole.

- Alors Damrisha il y a quoi là-dedans? Trouve moi quelque chose pour éponger le sang, je ne peux pas essayer de fermer une plaie que je ne vois plus sous une couche de sang…

La jeune fille aurait voulu le remettre à sa place et lui apprendre les bonnes manières. Elle aurait voulu lui dire que leurs "outils" risquaient de provoquer plus de dégâts qu'ils n'en soigneraient. Elle aurait voulu lui expliquer que, même en épongeant la blessure, le sang coulerait à nouveau. Il y avait peut être un truc de magicien qu'elle ignorait et elle n'écartait pas cette hypothèse. Elle garda sagement ses réflexions pour elle, et répondit poliment :

_ Il y a de quoi donner les premiers soins et limiter les dégâts en attendant des soins intensifs.

- Dites, vous ne voudriez pas allez vous occuper d'autres personnes ? pourquoi pas ?

Surprise, Damrisha jeta un regard interrogateur à Reyna. Pourquoi la pardusse insistait-elle pour les voir partir ? Elle semblait à l'affut, ses yeux parcourant l'infirmerie - ou ce qui était censé y ressembler. Alors que Reyna détournait les yeux, Damrisha s'agenouilla à hauteur de sa cheville blessée. Elle tamponna doucement les plaies et essuya le sang qui avait coulé. Comme prévu, une fois épongé le sang coulait à nouveau. Damrisha posa son "éponge" sur les plaies et attendit un peu avant de la retirer. Le sang coula encore mais en plus petite quantité - pour l'instant. Satisfaite, la jeune fille se releva et recula pour laisser la place à Mykhael d'intervenir. Elle regarda alors la pardusse pour enfin répondre à sa question.

_ Au fait, je suis humaine.

Reyna soupira en entendant Mykhael lui dire qu'elle ne pourrait rien faire même si elle n'avait plus de ronces en elle. Elle abandonna l'idée de s'enfuir, mais elle aimerait quand même pouvoir les aider à soigner les autres au lieu de rester assise à ne rien faire. Il lui demanda de le laisser faire son travail au lieu de le tourmenter avec ses questions.

Ensuite, il lui expliqua que la plaie n'était pas tout a fait guérie mais que c'était tout ce qu'il pouvait faire afin de garder ses forces pour d'autres patients. Il mentionna le fait qu'elle ne devait pas marche et qu'elle devrait attendre avant de renfiler des chaussures et de partir de ce trou perdu. Quand le jeune homme parla du danger d'infection, la jeune fille grimaça. Il la pria de ne pas gâcher les efforts qu'il avait généreusement donnés sous prétexte que personne ne voudrait plus aider la très aimable adolescente. Le mot aimable est, de toute évidence, ironique.

- Merci dit-elle

Elle l'avait remercié. Non mais vous vous rendez compte ?! D'habitude, Reyna était beaucoup trop fière pour remercier les gens, même s'il l'aidait. C'était une grande première chez elle ! Cela lui fit bizarre de remercier quelqu'un, tout le monde pouvait guérir les autres non ? Non pas tout le monde. L'adolescente n'aimait pas dépendre de quelqu'un d'autre, de peur de se lier avec ce quelqu'un, et que, quand il meure, elle soit triste et désespérée.

Elle repensa aux paroles de Damrisha quand elle avait pris les pansements. Elle était humaine. Une raclure d'Enkidiev. Esclave à la Colonie de Diamant. Bien fait pour elle ! Même si ce n'était pas une Fée, une maudite Fée, Reyna détestait les Enkievs. Ils ne pouvaient pas se soumettre une bonne fois pour toutes ?! Mais non, il fallait résister, faire disparaître les dragons, tuer un Gouverneur, mentir pour leur bien ! Quels idiots !


L'adolescente remonta la couverture sur son ventre et attendit. Elle attendait quoi au juste ? Elle ne le savait pas elle même. Faisons le point.

Elle voulait s'enfuir le plus vite possible
Elle ne pouvait plus marcher pour l'instant
Elle avait remercié quelqu'un ce qui était inhabituel
Elle n'éprouvait plus aucune sympathie pour l'humaine
Elle voulait aider l'apprenti sorcier étant donné qu'elle ne pouvait pas partir
ELLE VOULAIT DÉGUERPIR AU PLUS VITE !!!

[HRP : désolée de cette piètre longueur, je n'avais pas trop d'idées]

La jeune pardusse fit une drôle de tête quand Damrisha lui répondit. Elle semblait désagréablement surprise. Elle ne s'attendait visiblement pas à se retrouver face à une humaine en pleine colonie de l'Empire. Et elle n'avait pas l'air de porter les enkievs dans son coeur... Mais Damrisha s'en fichait royalement. Cette fille avait envahit un pays et ce pays s'était défendu. Elle ne s'attendait quand même pas à ce qu'Enkidiev s'incline sans rien dire, non ? Dans des moments comme celui-ci, Damrisha regrettait d'avoir trahit son pays. Elle aurait peut être dû défendre sa reine au lieu de la tuer, mais elle serait probablement morte. Ou pire. Elle avait entendu parler de filles qu'on avait envoyé dans des bordels ou qui servaient de défouloir pour leurs "maitres". Au moins Damrisha n'avait qu'à subir les caprices d'une gamine folle et idiote mais pas forcément cruelle volontairement.
Alors que Mykhael conseillait à la pardusse de rester tranquille, Damrisha observait les autres blessés. En majorité, ils étaient soit bandés à la hâte ou soit laissés sans pansements. Dans de rares cas, ils étaient plâtrés suite à une mauvaise chute dans la folle forêt des elfes. Ca et là, des guérisseurs - connaissant leur métier ou tout juste recrutés pour l'occasion - passaient de blessé en blessé pour les soigner du mieux possible. Ils en auraient probablement pour toute la matinée pour soigner tout le monde. Quelle plaie... Damrisha vit alors une jeune femme distribuer des petits sacs aux guérisseurs. L'un d'eux ouvrit celui que venait de lui donner et en vérifia le contenu. Damrisha le découvrit en même temps que lui : des fournitures de soins - propres et en bon état. La jeune fille jeta un coup d'oeil hésitant vers son propre sac avant de se décider. Elle l'attrapa et se dirigea vers la jeune femme.

_ Dites, est-ce que je peux avoir l'un de vos sacs ? On m'a donné celui-ci, mais voyez par vous même... Avec ça, j'ai plus de chance de tuer ces blessés que de les soigner.

La jeune femme l'observait avec méfiance sans lui répondre. Elle se demandait probablement pour une humaine se trouvait là au milieu des blessés. Quel était son but ? Qui était-elle ? Damrisha poussa un long soupir, c'était toujours la même chose : elle devait toujours se justifier.

_ Je suis l'esclave personnelle d'Halysselle Mathina Arabis Joyau d'Irianeth, fille du gouverneur de Diamant. J'assiste l'apprenti sorcier Mykhael pour soigner les blessés.

Les noms de la gamine imbécile et du petit bègue firent leur petit effet. La jeune femme jeta un bref coup d'oeil au sac que tenait Damrisha avant de lui prendre des mains.

_ Y'a erreur. Ca, c'est ce qu'on a donné aux soldats pour se soigner pendant l'expédition. Tiens.

Damrisha reçut avec force son nouveau sac qui lui cogna dans le ventre. Elle se contenta d'un grognement et se détourna de la jeune femme. Elle lui aurait bien refait le portrait et insulté de tous les noms, mais ça n'aurait servi à rien si ce n'est lui attirer des ennuis. Elle retourna donc près de Mykhael et ouvrit le sac pour en vérifier le contenu. Bandages, aiguilles, fil, pansements, baume... Rien de bien différent au premier sac, à la seule différence que tout était propre, de bonne qualité, et en plus grande quantité.
Damrisha prit un pot renfermant un baume sentant le camphre et les herbes ainsi qu'un pansement et une bande avant de s'assoir près de la cheville blessée de Reyna. Elle étala une fine couche de baume en prenant soin de ne pas arracher la croute fragile, puis elle apliqua le pansement avant de le maintenir en place grâce à la bande qu'elle enroula autour de la cheville. Quand elle eut fini, Damrisha referma le baume et le rangea dans le sac.

*Bon, j'espère que le gamin ne m'en voudra pas d'avoir agit sans son ordre... Mais si je ne fais rien, on va en avoir pour la journée !*

_ Voilà, maintenant la plaie est protégée. Le baume va accélérer un peu la guérison, mais pour aujourd'hui il vaut mieux éviter de courir les bois.

Un silence s'était installé entre les trois jeunes gens. Ce fut l'apprenti sorcier qui le rompit. En demandant à la Seccyeth en formation si son apprentissage lui plaisait. Il pensait que les formateurs, autrement dit les Seccyeth confirmé, étaient stricts, sévère, méchants, immoral. Reyna réfléchit un instant à l'adjectif qui pourrait qualifier Khanrell au mieux... Elle n'était pas particulièrement sévère, pas par excès en tout cas. Elle l'était mais de manière raisonnable. Elle n'était pas méchante, juste assez... directe, un peu froide et distante à la fois. L'adjectif qui la qualifiait le mieux serait...spéciale. Oui, voilà, elle était spéciale.
Mykhael, d'après ses dires, avait eu, lui aussi, un maître strict, qui s'occupait mal de l'adolescent qu'il était. Reyna ne voyait pas l'intérêt de parler formation mais l'écoutait, polie. Il lui demanda pourquoi son maître n'était pas avec elle.

- Pour être honnête, je suis d'avis qu'elle n'a aucune raison valable. On lui a proposé un poste, elle a refusé et a décidé de m'envoyer à sa place. Qu'est-ce qu'elle peut être têtue des fois ! Enfin, je suis pareille. Elle n'est pas Chef des Seccyeths pour rien, ça c'est sûr. Quand elle dit quelque chose, il vaut mieux lui obéir au doigt et à l'oeil.

L'adolescente soupira. Du coin de l'oeil, elle vit l'humaine demander un sac à quelqu'un. Bêtement, l'apprenti-sorcier lui demanda où elle était et si elle l'avait vu s'éclipser. La jeune fille soupira une nouvelle fois avant de secouer la tête de manière négative. Quand elle revint vers eux, il refit une crise de bégaiement. Il prétendit avec le peu d'assurance qu'il avait que l'esclave était sous sa responsabilité et que si il lui arrivait quelque chose, ce serait lui qui en pâtirait. Pauvre chou. Non mais franchement ! Entre condamné un apprenti-sorcier d'Irianeth ou condamné une vulgaire humaine servant d'esclave, il n'y avait pas photo ! On allait pas châtier les atouts importants des Colonies. Ayons un peu de jugeote je vous prie !

Damrisha ouvrit un pot de baume et lui appliqua une fine couche sur sa cheville blessée. En même temps, l'apprenti-sorcier était en train de poser plein de questions du pourquoi et du comment de sa procuration de baume et du reste du contenu du sac. Puis, voyant que personne ne lui répondait, il dit, au grand bonheur de Reyna, qu'elle pouvait renfiler ses bottes. Elle pouvait aussi aider à guérir les autres. Enfin ! Elle pouvait se lever ! Malheureusement, elle ne pouvait pas espérer courir. Mais au moins, bouger un peu lui ferait du bien. Il envoya l'humaine chercher des béquilles.

- C'est bon, je vais vous aider. Je n'ai aucune compétence magique en guérison mais je me débrouille avec les trucs...normaux.

Damrisha revint quelques instants plus tard, avec lesdites béquilles. La jeune fille s'assit sur le lit et se baissa afin d'attraper ses bottes et les enfila doucement. Elle s'appuya sur les béquilles et se dirigea précautionneusement vers un blessé. Reyna n'avait pas particulièrement l'habitude de marcher avec un appui et pourtant, elle n'avait aucun problème pour se déplacer.

- Vas-tu me surveiller comme l'humaine ? Je ne suis pas une gamine.

Eh oui ! Malgré le fait qu'il l'est guérie, elle restait toujours l'adolescente fière et arrogante qu'elle était !